- solitaire27 a écrit:
- J'aimerais beaucoup savoir où je peux lire au sujet de la photopériode, versus le rut ou les changements chez les espèces...
non pas que je ne vous crois pas, mais avec le temps j'ai appris à vérifier moi-même les différentes théorie avant de les prendres pour du cash... mes vieux confrères chasseurs m'ont appris tout un tas de chose que j'ai dut désapprendre par la suite! LOL
Mais sérieusement ca serait intéressant!
Je vous présente le texte intégral de l'article publié dans l'annuel de chasse 2008 (Sentier chasse peche) Les différents pics...
Il y a l’apogée du rut telle que vécue par les orignaux... et celle perçue par les chasseurs.
Afin de mieux comprendre les moeurs de l’orignal et augmenter nos chances de récolte, il est de mise d’approfondir nos connaissances sur les différents pics de la période de reproduction qu’on appelle le rut. À ce moment, différentes caractéristiques morphologiques, comme le panache du mâle ou la voix aiguë de la femelle, sont mises à contribution pour parvenir à la reproduction.
Chez l’orignal, le rut commence généralement vers la fin août ou au début septembre. Les mâles matures, sous l’effet de la photopériode décroissante, sont les premiers à connaître une hausse soudaine de leur taux sanguin de testostérone, l’hormone sexuelle mâle. Le tout se termine quelques semaines plus tard vers la fin d’octobre ou même au début novembre quand les mâles géniteurs voient leurs pulsions sexuelles s’atténuer au point de perdre tout intérêt pour la reproduction.
Ce sont donc les mâles qui déterminent le début et la fin de la période du rut. Ils sont les premiers prêts pour la reproduction, de façon à être disponibles pour féconder les femelles tout au long de la période des accouplements.
Entre les premières et les dernières fécondations, ils se passe de trois semaines à un mois. Il s’agit du laps de temps que dure la quasi totalité des accouplements, soit environ de la mi-septembre à la mi-octobre. Durant cette période survient une courte séquence de deux à quatre jours où l’activité sexuelle des orignaux atteint son apogée, généralement vers la fin du mois de septembre. Ce bref moment est le pic du rut.
Pic du rut et pic du «call»
Les femelles sont les maîtres d’oeuvre du pic du rut, car elles sont les premières responsables de son déclenchement. Toutefois, malgré le nombre important d’accouplements qui ont lieu pendant le pic du rut, cela ne signifie pas que la plupart des femelles sont fécondées durant cette période de pointe. Au contraire, c’est en additionnant les performances des jours la précédant et la suivant qu’on remarque que la majorité des fécondations de l’année s’y produisent. Les dates de ce pic du rut peuvent légèrement varier ou être parfaitement identiques d’un secteur à l’autre lors d’une année donnée, ou d’une année à l’autre pour une même zone.
De son côté, le pic du «call» relève de la réceptivité, ou si vous préférez de la vulnérabilité des orignaux à l’appel. Ce qu’on qualifie ainsi, c’est le moment de la saison où un chasseur a le plus de facilité à faire réagir un mâle mature au moyen d’appels vocaux ou à le provoquer avec du «rattling».
De manière générale, on considère que le pic du «call» coïncide avec le début des accouplements, soit vers la mi-septembre ou légèrement plus tard. Les fortes réactions des mâles matures à ce moment découlent de toute la tension sexuelle accumulée et pas encore libérée. En effet, chez le mâle mature, la sécrétion accrue de testostérone est commencée depuis deux ou trois semaines. Cette forte tension sexuelle diminue considérablement à partir du moment où il parvient à féconder une première femelle, devenant alors un peu moins agressif et un peu plus difficile à faire réagir, tout en conservant son statut et son instinct de géniteur.
Il ne faut jamais oublier que le pic du «call» est un concept créé par les chasseurs. Comme c’est à chacun de déterminer approximativement le moment où cette réceptivité atteint son apogée, cette donnée est plutôt variable.
Par exemple, la forte réaction d’un mâle dominant entre le 15 et le 20 septembre fera dire à un chasseur que le pic du «call» s’est produit durant cette période. À l’opposé, un autre adepte qui évolue dans un territoire n’abritant aucun sujet âgé de plus de 3 ½ ans et obtient une bonne réponse d’un immature vers la fin septembre ou le début octobre affirmera que cette période de pointe s’est produite à ce moment.
Le décalage entre les deux dates et les différentes interprétations proviennent du fait que les mâles plus âgés sont généralement plus agressifs et sexuellement prêts un peu plus tôt en saison que les plus jeunes, cela étant relié à la concentration hormonale. C’est ici que nous devons définir un troisième pic.
Le pic hormonal individuel
Ce concept réfère au moment de la saison où chaque orignal atteint son plus haut niveau d’hormones sexuelles (testostérone chez le mâle et oestrogène chez la femelle). La disparité dans le temps des pics hormonaux de chaque individu est relativement importante, plusieurs jours pouvant séparer ces dates chez deux mâles différents, par exemple un mâle pleinement mature versus un jeune. Alors que le pic hormonal d’un géniteur coïncide à peu près avec le pic du rut, celui du jeune mâle peut se produire après, déclenché par une concentration hormonale moindre. Voilà pourquoi un chasseur constate parfois une bonne réceptivité chez un jeune plus tard en saison.
Chez les femelles, c’est une tout autre histoire. La sécrétion d’oestrogène n’atteint pas son niveau optimal lors de la première ovulation, surtout si elle a lieu tôt en septembre, et les scientifiques la nomment «ovulation silencieuse». Les manifestations à caractère sexuel et apparentes lors d'une une première ovulation hâtive sont moins marquées que celles accompagnant ses ovulations subséquentes. Bon nombre de fécondations se produisent probablement pendant leur second oestrus.
L’ovulation silencieuse a pour effet de synchroniser un plus grand nombre de fécondations vers la fin de septembre. Pour les femelles, c’est le moment idéal si elles désirent donner naissance à leurs rejetons dans les meilleures conditions, à la fin de mai ou au début juin. C’est ce que les biologistes appellent la saisonnalité de la reproduction.
En milieu naturel, les femelles non fécondées à leur premier oestrus de septembre connaissent une deuxième ovulation environ trois semaines plus tard, et très exceptionnellement une troisième en novembre, ce qui reporte la mise bas en juillet. Ce dernier cas est plutôt rare, puisque généralement les mâles reproducteurs voient leur taux d’hormones sanguines chuter de façon appréciable après la mi-octobre.
Des expérimentations en milieu fermé ont établi que le cycle oestral des femelles dure environ 24 jours, les jeunes biches ayant des cycles légèrement plus courts que les plus âgées. Ces expériences ont aussi démontré qu’une femelle en captivité accompagnée d’un mâle ayant subi la vasectomie pouvait avoir jusqu’à six ovulations consécutives, ce qui reporterait sa fécondation au mois de février et la mise bas au mois d’octobre!
À la lumière de ces résultats, nous sommes forcés d’admettre que ce qui se produit en laboratoire ne se répète pas nécessairement en milieu naturel, aucun observateur n’ayant à ce jour rapporté l’existence d’un veau né en octobre.
Les variables
La date des différents pics n’est pas absolument constante ni précise partout dans l’aire de répartition, et plusieurs facteurs contribuent à ces variations. Précisons d’abord que lorsqu’un élément affecte la reproduction, il modifie légèrement le temps requis à la fécondation des femelles, le positionnement de leur pic dans le calendrier, et parfois les deux. Les variations seront d’au moins quelques heures, et tout au plus de quelques jours.
Les facteurs susceptibles d’affecter les pics sont de deux types, soit endogènes (qui font partie de la vie courante des orignaux) et exogènes (qui n’en font pas partie). Leur description nous permettra d’y voir plus clair et de mieux comprendre pourquoi il est impossible de prévoir précisément à quel moment de la saison chaque pic se produira.
Les facteurs endogènes
La densité
Dans un secteur de moyenne à forte densité (plus de 5 orignaux/10 km2), la faible distance entre les individus favorise les rapprochements. Cette bonne concentration accroît les possibilités qu’une femelle rencontre un géniteur dès sa première ovulation. On pourra aussi constater un pic du rut légèrement plus hâtif que dans une zone à faible densité. Il apparaît évident que dans un tel secteur, les chasseurs peuvent plus aisément repérer les orignaux et déterminer à quel moment ils sont plus réceptifs ou vulnérables. On y observera un pic du «call» plus hâtif, étant donné le plus grand nombre d’événements auxquels ils sont confrontés. C’est du moins l’interprétation qu’on en fera.
Le rapport des sexes
L’effet d’un ratio mâles/femelles élevé sur le pic du rut est sensiblement le même que celui d’une forte densité, c’est-à-dire qu’une femelle a plus de chances d’être fécondée dès sa première ovulation puisque le nombre de géniteurs disponibles est élevé. Un grand nombre de mâles dans un secteur donné entraîne une période de reproduction plus courte, et par le fait même plus intense.
À l’inverse, là où seulement deux ou trois géniteurs se partagent une vingtaine de femelles, plusieurs d’entre elles sont fécondées à leur deuxième ovulation, les mâles ne pouvant suffire à la tâche en un si court laps de temps. Cela allonge la période des fécondations et en diminue l’intensité.
Si le ratio mâles/femelles est élevé et que la densité est convenable, on devrait normalement retrouver bon nombre de mâles matures. Encore une fois, les chasseurs obtiendront une bonne réceptivité plus tôt en saison et constateront un pic du «call» un peu plus hâtif.
L’âge moyen des individus
Une femelle mature a sa première ovulation un peu plus tôt qu’une jeune, grâce à sa plus forte production d’oestrogène. Dans des conditions optimales de reproduction (bonne densité et bon ratio mâles/femelles), une population féminine composée uniquement de sujets matures donnerait un pic du rut un peu plus hâtif. Mais une population de femelles normalement constituée comporte toujours toutes les classes d’âge.
Par ailleurs, il est établi qu’un mâle mature voit son taux hormonal s’accroître plus tôt en saison que le jeune mâle. Si la population masculine d’un secteur était constituée uniquement de sujets matures, les chasseurs constateraient un pic du «call» plus hâtif et plus intense. Mais encore une fois, seul un événement hors du commun peut produire une variation notable en ce sens.
Les conditions climatiques
Des conditions qu’on pourrait qualifier d’«extrêmes» peuvent parfois modifier les activités sexuelles des orignaux, comme lorsqu’on subit les retombées d’une tempête tropicale. De la pluie et de forts vents faisant rage 24 heures sur 24 pendant quelques jours consécutifs peuvent reporter la fécondation d’un bon nombre de femelles à leur deuxième ovulation si elles ont été incapables de se faire entendre et de trouver un bon géniteur lors de la tempête. Par contre, vu les conditions météorologiques habituelles en septembre et octobre, ni la chaleur, ni les vents ou la pluie ne produiront un effet notable sur leur reproduction. Les mêmes remarques s’appliquent au pic du «call».
La latitude
Que les orignaux habitent dans le nord ou le sud de l’aire de répartition, ils vivent tous leur pic du rut à peu près simultanément, mis à part la possibilité d’un léger décalage. La seule différence notable se résume au fait que les femelles habitant plus au sud commencent à se reproduire un peu plus tôt et finissent un peu plus tard en saison. Elles agissent ainsi puisque dans ces régions le printemps arrive plus tôt et l’été dure un peu plus longtemps, ce qui leur procure une plus grande période favorable aux mises bas. Elles sont génétiquement programmées en ce sens.
Cette période de fécondations étant un peu plus longue, cela a pour effet d’en atténuer légèrement l’intensité, et vice versa au nord. Par contre, un orignal n’est pas plus réceptif à l’appel ou au «rattling» au sud qu’au nord. Tout dépend de sa concentration hormonale du moment.
La durée de la clarté du jour
Les petites variations quotidiennes de la clarté du jour, provoquées par différents éléments naturels (comme la pression barométrique ou la lune), n’ont aucun effet significatif sur le taux d’hormones sexuelles des orignaux. Par conséquent, cela n’a aucune influence sur leur reproduction, laquelle est un cycle annuel initié par la réduction de la photopériode.
Afin de valider cette théorie, des scientifiques ont volontairement rendu aveugles des femelles de certaines espèces animales dont la reproduction dépend de la photopériode. Celles-ci ayant toutes eu leur oestrus en même temps que les femelles témoins, on peut en conclure que les quelques minutes de clarté en plus ou en moins à chaque jour ne modifient aucunement la période de reproduction des orignaux.
Pour ce qui est des séances d’appel, les petites variations de la durée de clarté du jour n’ont aucune influence. Par contre, les facteurs à l’origine de ces variations de luminosité pourraient, selon certaines croyances et certaines statistiques de récolte de mâles, avoir un effet sur leur vulnérabilité.
Premièrement, en ce qui concerne la lune, certaines statistiques et de nombreux témoignages appuient l’hypothèse qu’une nouvelle lune (lune noire) accentuerait la vulnérabilité des bêtes. Les nuits sont à ce moment plus sombres, ce qui générerait un accroissement de leurs activités diurnes, et donc une plus grande vulnérabilité face aux chasseurs. Une nouvelle lune apparaissant pendant la période du rut pourrait légèrement modifier les dates et l’intensité du pic du «call», ou si vous préférez la période de leur vulnérabilité optimale.
Parallèlement, d’autres statistiques et témoignages tendent à soutenir une autre hypothèse selon laquelle une pleine lune entraînerait un accroissement des activités, tant diurnes que nocturnes, étant donné que la température moyenne durant cette période serait généralement un peu plus basse. On surnomme ces deux hypothèses combinées «la thèse de la lune». Aucune étude scientifique ne permet toutefois de les valider.
Deuxièmement, concernant la pression barométrique, les animaux semblent avoir la capacité de prévoir les variations du climat. Par exemple, à l’approche d’une dépression, les orignaux deviennent un peu plus actifs et plus réceptifs, ce qui les rend forcément plus vulnérables. Ils le sont tout autant après quelques jours de mauvais temps, alors qu’ils connaissent un regain d’activité.
Les facteurs exogènes
Les événements extraordinaires
Les changements majeurs comme les grands feux de forêt repoussent les populations d’orignaux hors de leur milieu de vie coutumier. Elles se déplacent dans un nouveau territoire, pour revenir quelques années plus tard dans leur ancienne zone maintenant en régénération. Cet effet passager sur la densité d’orignaux influencera le pic du rut et celui du «call» en périphérie de la surface brûlée.
L’exploitation forestière
Certains types de coupes forestières ont pour effet de concentrer les bêtes à l’intérieur de petites parcelles de territoire, ce qui affecte leur vulnérabilité et l’interprétation que les chasseurs font du pic du «call». Cette densité accrue d’individus dans un secteur produira également un effet sur le pic du rut des orignaux qui s’y trouvent à cause de leur confinement.
La chasse
La prédation humaine peut, à certains égards, avoir un effet sur la reproduction des orignaux. Par exemple, durant une année restrictive, la récolte d’un nombre important de mâles géniteurs dans un secteur donné en début de saison aura pour effet d’y réduire le ratio mâles/femelles. Il y aura donc allongement de la période d’accouplements et diminution de son intensité.
Les croyances populaires
Les préjugés et les croyances entretenus par certains chasseurs influencent leur perception du pic du «call». Par exemple, les statistiques accrues de récolte de mâles en rapport avec un effet de la lune font dire à certains experts que ces chiffres à la hausse pourraient bien être la conséquence de cette même croyance populaire. De nombreux chasseurs fixant leurs dates de séjour en forêt en fonction de la phase favorable du cycle lunaire en laquelle ils croient, ces succès accrus seraient directement attribuables à la plus grande pression de chasse à ce moment.
La prédation animale
La prédation animale n’a pratiquement aucun effet sur le pic du rut, car très peu d’orignaux en sont les victimes durant la période de reproduction. Par contre, l’interprétation que feront les chasseurs du pic du «call» dans un secteur infesté de loups ou d’ours sera considérablement altérée, les orignaux devenant généralement plus discrets et moins portés à répondre aux appels des chasseurs dans un tel lieu. Leur instinct de conservation prendra le dessus sur leur instinct de reproduction.
Une multitude d’autres facteurs exogènes pourrait apparaître dans cette liste, mais il n’est pas utile d’en énumérer davantage pour comprendre les moeurs de l’orignal.
Conclusion
Nous ne devrions jamais confondre le pic du «call» et le pic du rut. En relevant d’une perception, le premier ne se mesure pas comme on peut le faire avec celui du rut. En effet, il est possible de préciser approximativement dans le temps à quel moment de la saison précédente s’est produit le pic du rut. Des équipes d’observateurs sur le terrain notent les dates de mise bas et, en reculant dans le temps et en soustrayant la période de gestation, obtiennent les dates de fécondation approximatives. Le regroupement de toutes les données laisse apparaître les dates du pic du rut.
Sachant maintenant que l’intensité et la date des différents pics dépendent de nombreux éléments, on ne sera peut-être plus aussi catégorique quand viendra le temps d’en discuter entre amis. C’était un des buts de cet article! Je ne prétends pas être un expert, mais comme vous je suis un passionné et je souhaite simplement que nos futures chasses soient des plus fructueuses.
AA++